I. La pédagogie de
maîtrise (pédagogie par objectifs)
Postulat : "Dans les conditions appropriées
d'enseignement, presque tous les élèves (95%) peuvent maîtriser la matière
enseignée."
Idées forces :
- la clarté des objectifs : précis et accessibles
- le renforcement de l'effort et du travail
- la variété des supports didactiques
- le dépistage rapide et non sanctionné (formatif) des lacunes ou des
difficultés, suivi d'une remédiation
- une évaluation critérielle et non comparative
- du temps pour apprendre, avec une aide appropriée : intervenants
supplémentaires
- les trois étapes d'une séquence : enseigner – évaluer – remédier
- le noyau réside dans le feedback fourni par l'évaluation formative et
dans les activités de remédiation qui en découlent.
* La pédagogie de maîtrise,
d'origine américaine et par ailleurs soucieuse de "rendement",
est encore souvent victime de sentiments anti-américains sommaires qui
sévissent dans l'opinion et de la connaissance non moins sommaire que l'on a de
ses principes.
II. Les corrections
apportées par la PM "élargie"
(Faculté des Sciences
de l'Education de Genève)
Les héritiers de PIAGET qui ont
fait une critique constructiviste des travaux américains (Projet Rapsodie)
suggèrent, sans avoir pu tout à fait concrétiser, de :
- Moins chercher à définir des actions de remédiation que de construire
un contexte d'auto-apprentissage;
- Intégrer des éléments du travail préceptoral (régulation interactive
maître-élève) ;
- Organiser l'enseignement pour obtenir une pleine utilisation du temps;
- Susciter l'engagement des élèves;
- Prendre en compte les rythmes pour les optimiser ?
- Déléguer partiellement l'évaluation à l'élève : l'évaluation
formatrice (d'où l'importance de bien définir les objectifs).
- Mettre en place un processus de régulation dans une conception
constructiviste de l'apprentissage.
- Recourir à d'autres éclairages théoriques, à d'autres expériences,
pour pouvoir "passer à l'acte" (Hubaerman)
* Il est significatif que les
travaux de Bloom - bien que d'inspiration behavioriste - aient donné lieu ici
ou là à d'autres essais de prolongements ou d'élargissement, y compris dans le
camp des constructivistes. Les travaux de l'équipe genevoise, qui relèvent
d'une approche rigoureuse, ne semblent cependant pas avoir reçu l'attention qu'ils
auraient méritée.
III. La Pédagogie de
Maîtrise "à effet vicariant"
(Circonscription de Nouméa 3 :
années 1990-1996, puis circonscription "virtuelle" élargie grâce au Web)
La "Pédagogie de Maîtrise à
effet vicariant" s'inscrit dans la continuité des travaux précédents. Sa
dénomination a pu être critiquée, mais elle permettait de rendre compte
scrupuleusement de ses origines, du croisement opéré entre les travaux de
chercheurs reconnus et l'intuition fructueuse d'un psychologue non moins réputé.
La nécessité d'intégrer nouveaux
apports théoriques pouvait suggérer l'exploration d'une piste ouverte par
Maurice REUCHLIN, en référence probable aux travaux d'Albert BANDURA, inventeur
du concept d'apprentissage vicariant.
Réhabiliter
l'apprentissage vicariant,
(hypothéqué par sa parenté avec
le "copiage")
et l'adapter à des fins scolaires
Initialement conçue et
expérimentée en Nouvelle Calédonie dans le cadre de la "réforme
des cycles" mais aujourd'hui plus largement répandue et confortée
grâce à sa diffusion par Internet, cette approche reprend les postulats et
caractéristiques précédemment évoqués, mais elle vise à définir un mode
d'action immédiat, utilisable dans les conditions de fonctionnement actuelles de
l'école, avec le souci d'apporter une réponse "intégrée" qui
ne soit pas seulement une somme de petites modifications.
Constats et postulats
· Constate que la qualité majeure
du "bon élève" est son aptitude à savoir se situer, à savoir où il en
est de ses apprentissages et de ses ignorances
· Postule que cette aptitude peut
être développée et doit devenir la priorité de l'école
2. Postulat politico - épistémologique
· Constate que les difficultés
actuelles de l'école sont apparues avec la prolongation de la scolarité
obligatoire, et que l'on a incriminé alors l'impréparation du collège de façon
un peu exclusive
· Postule que la genèse du problème
est plus complexe, que les difficultés actuelles de l'école et des élèves sont
moins conjoncturelles que structurelles, comme si
elles avaient été inscrites dès l'origine dans la conception même de l'école;
3. Postulat éthique et pédagogique
· Constate que "éduquer"
et "instruire" peuvent présenter des rapports conflictuels, qu'un
souci d'évaluation légitime mais dévoyé peut faire obstacle à la communication
entre élèves, y compris la communication d'apprentissage, perturbant les
processus naturels d'apprentissage et générant à terme échec et violence;
· Postule que l'on peut redresser
cette anomalie en réorganisant la classe autour du concept clé d'apprentissage
originel, ou vicariant, pour permettre aux "novices" des prises de
repères sur les "experts", et développer par là des échanges
langagiers à tendance parfois métacognitive entre les divers acteurs de la
classe;
· Constate in fine que
la réhabilitation de ce mode d'apprentissage originel apporte au plan
pratique une amélioration quasi instantanée et significative du
fonctionnement de la classe tout en permettant à l'école, au plan
théorique, d'être plus en phase avec l'apport du cognitivisme et de pouvoir
ainsi aborder la réflexion pédagogique avec plus d'efficacité.
Idées forces
Une réforme ne peut réussir que
si les acteurs et les utilisateurs du système y trouvent leur compte. La
perspective sera donc résolument "ergonomique", centrée sur le
"rendement" et le "confort" des acteurs, tant sur le poste
"élève" que sur le poste "enseignant".
Permettre aux élèves de
travailler selon leurs rythmes et possibilités et aux maîtres d'observer et de
comprendre ce qui se passe dans les apprentissages (I.O. 1989)
Mais cela en conservant
un regard critique sur les problèmes de rythme,
en se gardant de sous-estimer les potentialités des élèves
et en travaillant à les révéler.
· favoriser la lisibilité des
comportements et procédures utilisées par les experts
· privilégier les initiatives
d'appropriation – apprentissage - questionnement au détriment du monitorat
- enseignement impositif
· dans le cadre d'un programme de
travail strictement défini et imposé, laisser l'élève choisir le moment
d'aborder sa tâche pour l'inciter à l'analyser, le placer quotidiennement,
dans un contexte sécurisé, en situation d'entraînement à l'analyse
· lui fournir quotidiennement des indices lui
permettant de réactiver ce travail d'analyse, en considérant
que l'aptitude à l'auto-évaluation est la caractéristique
essentielle du "bon élève"
· créer un besoin d'écoute,
de questionnement, d'échanges
· insérer la classe dans un
contexte d'ordre négociable favorisant le raisonnement
hypothético-déductif
· importance du travail
écrit s'alimentant des échanges verbaux quotidiens
pour les alimenter à son tour
Remarque : les apports de Freinet
Si le fonctionnement de la classe
"PMEV" rappelle à certains égards celui de la pédagogie Freinet, il
s'en distingue cependant sur certains points, modifiant ou renforçant quelques
unes de ses caractéristiques les plus courantes pour concrétiser ses propres
idées forces.
· le respect de la personne de
l'enfant, de son vécu, de sa parole, en prenant en compte les exigences de
l'environnement actuel;
· le respect des principes
d'entraide et de coopération, mis au service de l'effort et du développement
personnel;
· la mise en place d'un lieu de
parole, d'écoute et d'échanges, mais avec une fréquence sensiblement
accrue car centré plus systématiquement sur la gestion des
apprentissages(bilan) plutôt que sur la vie de la classe (les problèmes
justifiant un débat sur la vie de la classe étant souvent générés par les
tensions résultant des difficultés d'apprentissage).
· redonner du sens aux
apprentissages et laisser beaucoup de temps au travail personnel et
soutenu;
· organiser son travail à l'aide
d'un plan et le gérer, mais sur la base du programme commun de la
classe : pas de plan individualisé, sauf exception, mais une progression
individualisée et étayée ;
· l'entraînement quotidien à
l'écriture, mais sans recours systématique à la publication, dans
une perspective de reconnaissance et de gratification
immédiate;
· la possibilité de choisir son
travail, ou plutôt de choisir le moment de l'effectuer, car il est
nécessaire d'apprendre à analyser pour pouvoir choisir et devenir capable
d'auto-évaluation;
· le plan de travail, non
négociable à l'origine mais portant sur une durée plus longue pour améliorer
les possibilités d'étayage et de travail personnel (3 semaines en
moyenne).
* L'appellation de PMEV, souvent
mise en cause pour éluder les débats de fond, répond au besoin élémentaire de
se situer avec précision dans le maquis des courants pédagogiques. Elle
s'imposait par le croisement des deux apports qui ont permis son apparition :
le courant "mastery learning" (PM) et le courant
"vicariance" (EV).
* La dimension
"ergonomique" de la PMEV n'est pas étrangère à son succès, mais la
définition extensive du terme "ergonomie", qui fait notamment
référence aux idées de "confort" et de "rendement",
peut elle aussi prêter à des critiques faciles.
* Le modèle des "processus vicariants" (M. REUCHLIN), qui n'est pas
directement en cause dans la genèse de la PMEV, peut conduire à une
certaine mise en cause des idées reçues sur la différenciation
pédagogique .
Source : pmev.lagoon.nc
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